Il est difficile de donner une définition du voyage, cela peut être tellement de choses, et il y a tant de façons différentes de voyager… En tout cas, une chose est sûre, c’est que voyager n’a rien à voir avec des vacances.

Un voyage, ce sont des rencontres, des découvertes de cultures et de personnes, c’est avant tout un mode de vie que certains choisissent d’adopter pour une période de leur vie (ceux qui font un tour du monde par exemple).

Dans ce contexte, il y a un élément qui vient souvent gâcher la vie du voyageur.

Et ce ne sont pas les moustiques, ce n’est pas la tourista non plus. Ces deux éléments sont ponctuels et font quasiment partie du décor…

Non, le pire ennemi du voyageur sur le long terme, celui qui va venir insidieusement et indirectement enlever beaucoup d’authenticité et de possibilité de partage, et va aussi venir grever le budget du voyageur, hé bien C’EST LE TOURISTE.

Oui, le touriste, avec ses dollars et son attitude, transforme profondément les lieux où il est accueilli en masse, et la mentalité des locaux.

La demande touristique créant l’offre, nous allons voir quelles sont ses impacts négatifs pour le voyageur qui n’est pas du tout dans le même état d’esprit et dans le même espace temps / argent.

Vision déformée de la richesse réelle des occidentaux

Je vais parler du point de vue des touristes occidentaux, car ils représentent encore la majeure partie des touristes dans le monde, même si les touristes chinois sont en progression rapide, surtout en Asie. Et aussi parce que j’ai le type physique occidental, et qu’on me confond donc souvent avec un touriste blanc (et pas avec un touriste chinois ou latino).

Le touriste est là pour profiter, pour optimiser son plaisir lors de ses courtes vacances. Il a travaillé toute l’année pour pouvoir se payer sa soupape de sécurité et relâcher un peu la pression. Alors il va peu compter son argent et va être prêt à payer 10 fois le prix normal local sans vraiment négocier, car c’est encore 2 à 3 fois moins cher que chez lui et qu’il va trouver cela très « bon marché ».

Du coup, les locaux sont témoins de cela et pensent que tous les « blancs » dorment sur des tapis d’euros ou de dollars. Ils ne sont pas du tout conscients que :

1 – Seuls les occidentaux les plus riches voyagent à l’étranger. Même si le tourisme de masse s’est développé, rien qu’à cause du billet d’avion, des vacances à l’autre bout du monde sont quand même réservées à des gens avec un peu de moyens.

2 – Les touristes dépensent bien plus en vacances que ce qu’ils dépensent sur une base normale chez eux. Ils sont donc en fait moins « riches » que ce que leur attitude en vacances laisse transparaître.

3 – Les voyageurs, eux, ne peuvent pas se permettre de dépenser 750 euros par personne et par semaine (ce qui est en gros le budget d’un touriste, et cela est souvent même bien plus), cela fait 3000 euros sur une base mensuelle, c’est énorme pour un voyageur, sans compter les billets d’avion…

Les locaux des endroits touristiques ont donc une vision complètement déformée de l’aisance financière réelle des « blancs » en général, et des voyageurs (une catégorie à part) en particulier.

Et c’est assez pénible de devoir lutter sans cesse pour payer le prix normal du pays, tout ça parce qu’un touriste blanc (ou chinois d’ailleurs) :

  • n’ayant aucune idée du niveau de vie local,
  • ou voulant montrer qu’il est « supérieur » avec son argent (ça, c’est le pire)
  • ou voulant aider ces « pauvres gens » (typique d’une mentalité anachronique de « paternaliste », mais qui du coup distord complètement l’échelle de mérite des locaux, les plus riches étant tout simplement ceux en contact avec les touristes et pas ceux qui travaillent le plus)

a auparavant lâcher sans retenue ses billets condescendants.

Et de là à expliquer aux autochtones ce qu’est vraiment la vie en Occident, que les gens ne sont pas tant heureux que cela même s’ils peuvent s’acheter plus de choses qu’eux…. C’est quasiment mission impossible!

Les locaux ne rêvent souvent qu’à imiter les occidentaux, quitte à défoncer les dernières forêts de la planète pour avoir droit eux aussi à leur iPhone… mais ça c’est une autre (triste) histoire.

Vision déformée de la mentalité des Occidentaux

Encore une fois, les touristes sont là pour profiter et se faire plaisir après s’être fait chier dans leurs bureaux toute l’année.

Et certains (heureusement une minorité) ont des attitudes extrêmes vis-à-vis de l’alcool, de la drogue ou du sexe opposé qui peuvent choquer les locaux. Même si une certaine partie de ces locaux essaient de tirer partie de ces caractéristiques (vente d’alcool, de drogue, ou prostitution masculine ou féminine), la plupart des gens « normaux » en retiendront une mauvaise image des occidentaux (ou chinois ou sud-coréens) : une image de débauche plus accentuée que la réalité (statistiquement parlant).

En tant que voyageur, ce qui m’intéresse, c’est de rencontrer les habitants pour découvrir leur culture et lier des amitiés ou des histoires d’amour avec eux, et pourquoi pas rester, si cela me plaît.

Cela est parfois rendu plus difficile dans certains endroits touristiques à cause de la méfiance des locaux envers les étrangers, due à l’attitude de certains.

Reproduction du même confort et de la même gastronomie

Ce que recherchent beaucoup de touristes lors de leurs vacances (pas tous, mais la majorité), c’est finalement d’en prendre plein les yeux (paysages de carte postale, architecture, etc), et de prendre leur dose de soleil, avec plus ou moins le même confort que chez eux.

Ils veulent manger la même merde nourriture qu’à la maison (hamburgers, pizzas, frites, pâtes), boire les mêmes produits chimiques (sodas, bières), ce qui implique au passage pas mal de déchets d’emballage dans des pays où les infrastructures de traitement des déchets sont inexistantes.

Les charmants villages sont donc remplacés peu à peu par des hôtels tout confort en béton, des fast-foods et pizzerias aux enseignes fluorescentes et des boites de nuit disco / techno au bord de belles plages entourées de poubelles.

malbouffe mondiale

Dites vous bien qu’à chaque fois que vous mangez de la bouffe industrielle ou cuite à très haute température, c’est le même genre de dégât sur votre santé que si vous fumiez un paquet de cigarettes… (ça vous calmera peut-être?)

Le monde s’uniformise à grande vitesse (surtout sur le modèle américain : plus un pays se développe et plus on y retrouve les mêmes chaînes Starbuck’s, Macdo, Pizza Hut, etc) et l’authenticité disparaît peu à peu.

Cela n’est pas dû qu’au tourisme d’ailleurs, mais aussi aux désirs des populations locales.

Pour un voyageur qui souhaite découvrir la diversité du monde, c’est hélas de plus en plus fréquents de retrouver les mêmes modèles décalqués partout.

Je trouve que les gens tendent à vivre de la même façon partout dans le monde (la façon « développée » chère au FMI, car cela en fait un débouché pour les multinationales et créée de la croissance), et que les spécificités des différentes cultures se transforment en simple folklore pour les touristes (une petite chanson du Buena Vista Social Club devant des frites ici, un spectacle de salsa là, une cérémonie bidon et payante dans un temple hindouiste, une visite hors de prix dans un village tribal où les habitants vivent en fait ailleurs avec des télés et des motos)

Les cultures traditionnelles ne font plus partie du vrai mode de vie des gens, mais se monétisent pour en faire juste du folklore pour les touristes.

Le touriste est une espèce en voie d’expansion rapide

Enfin, même s’il reste des endroits épargnés par le tourisme, où l’on peut encore trouver une atmosphère particulière, chaleureuse et authentique, ils sont de plus en plus rares. Chaque coin intéressant et à potentiel étant accaparé par des investisseurs pour y construire des logements et restaurants à des prix proches de ceux en Occident (un peu moins cher tout de même pour que le pigeon ait l’impression de faire une bonne affaire).

Et le marché est là, puisque le nombre global de touristes augmentent chaque année à une moyenne de 4%…

Tout n’est pas noir

Dans cet article j’ai voulu faire un peu de provocation en soulignant l’antagonisme entre touriste et voyageur, mais tout n’est pas blanc ou noir. La frontière peut même être floue… Moi-même (qui ai fustigé le pauvre touriste) en tant que « voyageur », j’aime bien parfois profiter des infrastructures touristiques.

Je suis content par exemple quand des clubs de plongée existent dans certains endroits pour pouvoir explorer les fonds marins, et cela ne serait pas possible sans le développement local du tourisme.

Parfois même, le tourisme peut se développer intelligemment et améliorer la protection de certains biotopes, et sauver des zones qui seraient condamnées à l’avidité locale sinon.

Et si les gens des pays « développés » (Chine incluse) avaient des vies plus équilibrées, ils auraient peut-être moins envie du type de tourisme paillette qui prévaut actuellement…

Rendez-vous dans quelques décennies (si toute la nature sauvage n’a pas été détruite d’ici là) lorsque la technologie (robots, ordinateurs surpuissants, monde hyper-connecté, etc) aura libéré l’Homme de la plupart des tâches non épanouissantes et que le travail sera une activité créative et plaisante (sous réserve qu’un minimum vital puisse être donné aux gens, nombreux, qui ne travailleront pas dans ce nouveau modèle)

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