La Mongolie, son peuple nomade, ses troupeaux de bétail s’épanouissant à l’infini sur des steppes plates et désertes, parsemées de seulement quelques yourtes par-ci par-là… Vivre en Mongolie pour un temps, habiter dans une yourte avec les nomades, est un rêve qui me caressait depuis longtemps déjà, pour tester un mode de vie aux antipodes de celui auquel je suis habitué.

Récit d’une « vie nomade »… et d’une immersion dans un enfer gastronomique.

Construire une yourte

Dans la vallée de l’Orkhon

Après avoir pris mon vol pour la capitale de la Mongolie : Oulan Bator, avec escale à Moscou (environ 1200 €), je prends un transport privé pour la vallée de l’Orkhon où se situe ma famille d’accueil.

J’avais envie de construire une yourte, et de vivre en yourte pour un mois, donc le « contrat » avec la famille nomade est le suivant : j’achète ma yourte (200€), je la construis (avec leur aide bien-sûr!), je les aide dans les travaux quotidiens (traite des animaux, coupage du bois, etc), je leur laisse la yourte en partant, et je ne paie rien d’autre.

Construire une yourte prend environ une heure, à deux personnes.

construire une yourte

Acheter une yourte contemporaine, est-ce cher ou pas cher?

Pour information, le prix d’une yourte classique en Mongolie est d’environ 150 à 300 euros. Les modèles les plus luxueux atteignant maximum 800 euros.

Si vous souhaitez acheter une yourte contemporaine pour mettre dans votre jardin, étudiez bien l’option de la faire venir directement de Mongolie pour l’obtenir moins cher. J’ai vu des vendeurs de yourte en Europe les vendre aux alentours de 10 000 euros !!!! Le prix de la logistique et du transport d’une yourte moderne n’est certainement pas aussi élevé!

Vivre dans une yourte

Un lit en bois avec un amoncellement de tapis pour servir de matelas, une table, un tabouret, un poêle, je suis installé dans ma yourte, dans laquelle je vais habiter pendant un mois, coupé du monde (pas d’internet, pas de réseau téléphonique, pas de route ni de transports réguliers), à l’abri de l’immensité de la steppe. A l’abri… Je ressens en effet cet isolement comme une protection, ces plaines mongoles m’épargnent les mauvaises nouvelles, les problèmes géopolitiques, les angoisses de croissance économique qui semblent importer plus que tout dans la société moderne.

Pour un européen comme moi, élevé dans la société de la communication et hyper connecté, c’est une autre planète.

Vivre en Mongolie : travaux agricoles

Une autre vie m’attend…vivre au rythme de la nature… ou plutôt, au rythme des animaux d’élevage… car la traite n’attend pas!.. et a lieu deux fois par jour, à heures fixes.

Les premiers jours, j’ai besoin d’une matinée entière pour traire 20 chèvres. Après une légère tendinite au poignet et 3 semaines de pratique, deux heures!

La traite des animaux est la principale activité de la journée mongole, les autres étant la coupe du bois (la vallée de l’Orkhon est en effet boisée sur ses collines), et la récolte des bouses d’animaux séchées (un bon combustible pour le poêle de la yourte).

vie nomade

Dormir dans une yourte

Une nuit dans une yourte est en soi une expérience marquante. Hormis la légère odeur de crottin de cheval qui s’en dégage (mais qui passe complètement inaperçue après quelques jours passés à proximité du crottin de vaches et de chèvres), le principal obstacle à une bonne nuit est …le froid.

Pourtant nous sommes en plein été…Souvent dans ma longue attente glaciale et semi-endormie de l’aube, un cauchemar revient souvent, celui de la Mongolie l’hiver : des chèvres me versent leur lait glacé sur le visage directement depuis leur pis, sous le rire continu et moqueur des moutons bêlants.

Après épuisement du combustible du poêle, et à moins de se lever toutes les 2 heures pour en remettre, le froid extérieur (environ 5°C) s’installe vite à mes côtés.

vivre dans une yourteLe lever à l’aube n’en est que moins difficile (paradoxalement), car c’est un vrai bonheur de se glisser dans la yourte voisine où la chef de famille (et veuve) allume le poêle et prépare le petit déjeuner… La chaleur réconfortante (qui donne envie de se rendormir et de rattraper les heures gelées … mais impossible ! la traite n’attend pas!) et l’odeur de la bouse séchée enveloppent l’atmosphère et font oublier les ingrédients fermentés et peu avenants du petit déjeuner mongol.

A ce propos, connaissez-vous au moins une spécialité mongole..? En voici quelques-unes…

Gastronomie mongole

Barbecue mongole

barbecue mongolC’est ma spécialité mongole préférée! Quand une chèvre est tuée (ce qui n’arrive qu’une fois toutes les deux semaines en moyenne), on place sa chair dans un grand wok où des pierres volcaniques surchauffées ont été placées. Les pierres grillent la viande, et ensuite, le tout (morceaux de viande, pierres, pommes de terre) est laissé à mijoter sous un feu pendant une heure. Plat de fête, hélas trop rare.

Viande de mouton

On pourrait dire que la gastronomie mongole est à base de viande de mouton et de viande de mouton. Elle est en effet servie à tous les repas simples et quotidiens, sous forme de beignets (khuchuur) le plus souvent, ou de ravioles (buuz). C’est l’overdose de mouton, de gras de mouton, d’huile de gras de mouton. Sans légumes, sans crudités.

Fondue mongole

Ce n’est qu’à la capitale de la Mongolie, Oulan-Bator, que j’ai pu tester ce plat : il était bien trop élaboré pour là où je vivais. En effet, il requiert pas mal d’ingrédients : le bouillon, dans lequel on va plonger des morceaux de foie de veau, de filets de yak, de morceaux de mouton (évidemment!), est constitué d’eau bouillie avec une racine de gingembre, de la sauce soja, un chou chinois, du vinaigre.

Délicieux ! (enfin, toute proportion mongole gardée…;-)

Thé au lait salé

Le thé au lait salé (suutei tsaï) est un peu la boisson nationale, il se boit à tous les repas. C’est un thé noir de Chine accompagné de lait, de sel, et même souvent d’un peu de beurre.

C’est à l’image de toute spécialité mongole : pas très bon, voire pas du tout, mais on s’y fait.

Boissons fermentées

A la base, les nomades avait trouvé ce moyen de fermentation pour conserver plus longtemps tous les produits laitiers de leurs élevages.

La plus célèbre de ces boissons fermentées est l’aïrag : le lait de jument fermenté. Boisson acido-alcoolique (seulement 2 à 3°C d’alcool) qui a un goût de faisselle aigre et légèrement piquante. Sans commentaire.

Aller au Naadam festival

Mon séjour a lieu au moins de juillet qui est aussi le mois du festival du Naadam, le fameux festival de joutes et de lutte, qui célèbre chaque année la fête nationale mongole.

Ces « jeux olympiques » mongoles ont seulement trois épreuves :

  • courses de chevaux (pour les enfants de 5 à 12 ans)
  • tir à l’arc (les femmes peuvent participer)
  • lutte mongole (pour les hommes)

et se déroulent dans chaque village et ville, avant la grande finale entre 11 et 13 juillet à la capitale, Oulan-Bator.

Ma famille d’accueil et moi nous rendons donc vers la ville la plus proche, Karakorum, pour goûter aux festivités. Les mongols, revêtus pour l’occasion de leurs habits traditionnels, arrivent de partout, en cheval, en voiture, à pied, pour se rassembler dans un immense campement à ciel ouvert.

Courses de chevaux

Après une course de 30 kilomètres, les compétiteurs (âgés de 5 à 12 ans!) pour le titre de Genghis Khan junior franchissent la ligne d’arrivée :

Tir à l’arc

naadam mongolieFemmes mongoles, bien portantes et élégamment vêtues, aimant la vie simple à la campagne et les couleurs vives, cherchent à frapper de leur flèche de Cupidon une botte de paille vivant à une centaine de mètres, si possible ayant le sens de l’humour et sachant subvenir aux besoins d’une progéniture composée de chevreaux, moutons (non, pas eux!!) et yaks. Alcool laitier fourni pour les longues soirées d’hiver.

Lutte mongole

Les lutteurs mongols se présentent à la foule en exécutant une danse de l’aigle. Ce n’est pas pour impressionner leur futur adversaire (ça ne fonctionnerait pas, habillé dans cette tenue), ce n’est pas non plus pour s’échauffer, c’est pour … se purifier.

Les raisons pour lesquelles les lutteurs sont si légèrement vêtus sont :

  • éviter que des femmes ne se glissent dans la liste des compétiteurs (c’est déjà arrivé!)
  • diminuer au maximum les prises de vêtements possibles entre les lutteurs

Le gagnant est celui qui met à terre son adversaire. Pas de chichi. Le vainqueur de la finale locale reçoit une couronne, le droit de participer à la finale à Oulan-Bator, et … un bol de lait de jument (quelle chance!).

Alors? Vivre dans une yourte en Mongolie, c’est comment?

Premier constat, ce n’est pas vraiment une vie nomade, puisque les familles ne se déplacent que deux fois par an : une fois pour rejoindre le camp d’été, une fois pour rejoindre le camp d’hiver, situé à seulement quelques dizaines de kilomètres.

Il s’agit donc plutôt d’une vie à la campagne sans aucun confort (pas d’eau courante, pas de toilettes, pas de papier toilette, un chauffage rudimentaire).

Je dirais une c’est une expérience sociale, plus que naturelle. La nature est certes là, immense, grandiose, mais le quotidien est passé avec des locaux et des animaux domestiqués, pas en plein coeur de la nature sauvage.

Mais une expérience sociale limitée : la communication verbale est difficile (sauf quand l’alcool coule à flot), les habitants ne parlant pas l’anglais.

Ces précisions étant faites, j’en garde un souvenir extraordinaire et marquant de retour à une vie simple, contemplative, agricole. Une cure de désintoxication au flot d’informations continu de la vie occidentale, le plaisir des choses simples (un bol de soupe chaude après le travail dans l’air glacé, un sourire échangé le matin au réveil), une communication faite de gestes, de regards, et d’actes qui invitent au respect.

Cette vie mongole ne peut se prolonger (il est difficile pour moi, européen, de m’habituer à une vie aussi différente), mais sa nostalgie restera ancrée en moi pour toujours.

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